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30 août 2015

Knock Out [Ep. 02]

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            Le gravier devant le garage de la location crissa et le son distinct du frein à main automatique s’enclenchant pinça comme une tante la joue du silence du lotissement. Je m’extirpai du canapé en sautillant, soufflant, battant l’air de mes poings. Raspoutine entrait dans la cuisine en couloir qui donnait sur la terrasse, une caisse de nourriture entre chaque bras. J’ai vu des poireaux y dépasser d’en dessous. Me voyant sautiller devant le buffet il me lança « vient faire un câlin à ta Poupoune » en tendant les bras. Et après n’avoir pu retenir un sourire je m’élançai lui briser les côtes. 

            Tu devrais faire gaffe, il me dit alors que je resservais l’assemblée d’une seconde tournée de mousseux. « Tu sais que c’est pas bon pour toi. » Je ne répondis pas et finis de nous servir en en mettant un peu moins dans mon verre. Nous trinquâmes, brisant d’un éclat cristallin le perpétuel crissement des cigales.

            Lise avait fini de débarrasser la table, on l’entendait depuis la terrasse commencer à remplir le lave-vaisselle. La nuit nous était tombée dessus à sa manière. « T’as bien tenu l’artiste, me dit Poupoune dans l’obscurité, très bien même.

- Merci ‘Poune.
- Tiens.
- Merci ‘Poune. » 

            Il ne sourit qu’à moitié car il savait bien quel diable il nourrissait, mais c’était bon, et je n’ai ouvert les yeux qu’un long moment après avoir avalé ce shot de vodka. Ils allèrent se coucher, ensemble, après m’avoir bordé de douces paroles et de promesses de rêves raffinés. Je tenais fixe mon attention sur une galaxie far far away. La lumière de leur chambre s’évanouit. Je glissai jusqu’au frigo que j’ouvris fort comme un murmure. Je pris une tomate, le reste de mousseux et retournai dehors. Mollement le mousseux emplit le verre et longtemps j’en observai le fond comme un pal océan de nébuleuses. Dans l’entrée trainait un petit sac de voyage à Lise. Dans la poche à fermeture éclaire du dessus, tout au fond, était caché un vieux paquet de Camel à rouler sous plusieurs paquets de Kleenex neufs. Dans la blatte usée, le tabac séchait piano et des feuilles se pelotonnaient dans un coin. Je me léchai une longue sèche bien tassée, attrapai la fishboard et fit rugir les roulements à billes. A quelques villas de là un groupe jouait aux boules. Je les dépassai, bruyant, pliée dans la vague de la mécanique bien huilée.

            L’onde vibrait, très nette au bout, je me cramponnais fort, effleurant l’écume brune, grise, pétillante. Je plissai les yeux, battis nerveusement des pieds et collai mon menton à la planche. Tonnerre aquatique. Souffler du zen’. Se débattre des cannes. Souffler deux fois son volume d’air. Inspirer. Glisser. Vite. Peser le poids du jour. Raspoutine agitait les bras, plus loin sur la plage. Je lui fis un petit signe de la tête en sortant de l’eau. Le courant était contre nous et j’économisais mes forces pour taper d’autres rouleaux comme celui-là. « Joli ride, même si t’as dégusté sur la fin. On s’en fait une ensemble ? Raspoutine tendait le bras vers la glacière.

- Comment va Lise ? je dis en lui lançant un bouteille de pamplemousses pressées. » 

            Nous l’observâmes jouer avec les vagues et c’était comme regarder un enfant faire tomber les boites vides d'une de ces fêtes foraines à la con. « Elle sera pas médecin. Enfin, pas cette année. Elle va continuer à vendre des vélos le temps de savoir si elle est prise ailleurs, je suppose. » Il attrapa un galet qu’il lança dans sa direction. « Je crois qu’elle s’y fait.

- Ouais. Une femme qui dit... enfin bref, tu comprends.
- Ouais. »

            Son bras passa au dessus de mon épaule. Je saisis son poignet. Il me tira vers le haut. J’avais des fourmis dans les doigts. De sous une serviette de bain sec mon portable clignotait. « Il est quelle heure ? je demandai.

- Bientôt onze heure trente.
- On s’en fait une dernière grosse ? »

            Ras’ posa sa main en visière, son regard perçant les flots résolvait les mystères qui sommeillaient sous l’azur étendue synchronisée. « Tu vois cette ligne blanche qui coupe toutes les autres ?

- Ouais.
- On va là. »

A suivre... 

 

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