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20 mai 2011

47. Insistance [Ep. 01]

Insistance            Passant beaucoup de temps, dans l’attente de ce moment, où le frisson s’attendrit, que par foisons d’écarlates reflets, dans mes iris, y surgissent les plus beaux démons – peut-être est-il minuit. Sur les coups de vingt heures.

            On peut pas dire que ç’avait été la meilleur des sessions – avec où sans Linkin Park. Des mecs mal-embouchés et basanés et très courageux, en manque de nicotine, m’étaient tombés dessus pour me régler mon compte. J’avais dis non, comme un con. Dès que je repense à la scène, je deviens plus piquant qu’un hérisson. En soit, j’ai pas la plus jolie des gueules, même si je suis un minot, c’est pas moi qui le dis, c’est les condés. Paraîtrait que c’est l’une des raisons du pourquoi du comment – si vous y comprenez quelque-chose.

            Je sirote ma mousse, c’est toujours ça de bon et puis j’en oublie mon genou.

            Le Patron me plaît. Sa bonhommie apparente m’interpelle, et plus je l’observe et l’écoute discuter et plus le bonhomme me charme. Je comprends pas tout ce qu’ils se racontent, accoudés au zinc, mais leurs intonations sont des détonations de bonne humeur. Je fais l’éponge, absorbe tout ça, parce que ça fait du bien là où j’ai mal – l’égo ; au cas où.

            Y a pas de carillon, donc y a rien qui tinte, et José Bové s’avance vers le patron, avec son gros chapeau de paille et un rictus sincère – les yeux plissés – et le patron lui serre chaleureusement la patte en lui disant salut ma race, comment tu vas Jacqui ? Les autres clients avec qui il parlait se retournent et lui rendent la pareille. Puis José Bové s’assied à la place vide à ma droite et je lui dis bonjour. Bonsoir mon garçon, qu’il me répond.

            Ca me fait un bien fou d’avoir rien d’autre à faire que ça, l’arrière-train vissé sur le haut-tabouret. J’adore les hauts-tabouret.

            Le bar commence à se vider. J’ai entamé une conversation avec Jacqui sur les droits fondamentaux des cheminots. Très très intéressant dis-donc…

Je commence à me faire chier, mais interlocuteur se redresse d’un coup, et solennellement, m’annonce devoir pisser. Quand il descend les marches, je me fais une bonne frayeur, parce que je me dis qu’il va jamais pouvoir toutes se les faire autrement que sur les fesses, voir le nez.

-         Y a du vent dans les voiles, siffle le Patron.

-         Ouais, ça souffle fort on dirait. (c’est moi qui parle)

Un rire étouffé éclate. Je tourne la tête et je remarque un client que je n’avais pas vu. Il semble être ici depuis le commencement. Je ne sais vraiment pas comment j’ai fait pour pas le voir, d’autant plus qu’il fume, comme un roi, sûr de soi, dans le bar. Incroyable. Je lui demande :

-         C’est quoi comme langue que vous parliez ?

-         Mon garçon, ce que tu entends c’est du Kabyle.

-         J’en avais jamais entendu.

-         Et pourtant ! Dieu sait que c’est une belle langue…

Deux heures plus tard on était toujours là, le Patron, Kateb et moi. S’avérait que ces mecs étaient des encyclopédies sur la Kabylie. J’ai trouvé ça super intéressant, sans réelles bonnes raisons.

            J’ai écrasé ma dernière cigarette pour boire ma dernière gorgée de Coca. Je voulais pas boire plus d’une bière, c’était chose faite depuis perpèt’, et bien qu’ils aient tenté de me payer des coups, j’ai tenu bon, m’accrochant à mon verre de soda. Je me suis même fait un peu chambré.

Il allait être l’heure de fermer. Onze et des poussières qu’il est, et paraît que c’est un record. Je reste silencieusement circonspect, je me dis qu’ils se foutent de moi.

            Tout le monde sort, c'est-à-dire les trois qu’on est. J’aide le patron à sortir sa grosse poubelle. Il me dit merci et rentre bien, et Kateb aussi. On se serre la main et chacun prend son chemin. Plus tard je comprendrai que le Patron et Kateb rentre ensemble. Le covoiturage c’est cool pour la planète, ce genre de discours…

            Je m’engage dans la rue qui me ramène à chez moi. Elle est longue, large et silencieuse, et des voitures y sont à peu-prêt garées, ça et là. Et là, maintenant, je crois me taper une halu ! Y a un espèce de guignol qui fait le zouave en brandissant – tout fier le gamin – un fumigène en faisant de grands moulinets avec ses bras. Je me frotte les yeux – métaphoriquement ; vu que je suis net, que j’ai pas picolé, que j’en ai pas besoin en fait.

            Y a un mariol de dix-sept piges qui brandit un fumigène en braillant, devant ma grille d’entrée.

            Je reste interdit. Je sais pas quoi faire. De ma lèvre où pendouille ma Lucky Strike, de la cendre tombe.

 

A suivre...

 

Photo : Estia

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Commentaires
T
Ouais, ça arrive, ça arrive... mon manque de constance m'exaspère (et vivent les allitérations !)
D
Bon au moins tu m'écris un joli texte sur le net ;)<br /> <3
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